Bastan !

 


Blasés de la plage, amateurs de sensations fortes, amoureux de la nature, venez vous ressourcer dans l'eau vive du Bastan ! Venez-y en groupe, en famille, entre amis car, pour se plonger dans cette fraîcheur, le regard des proches inspire la vaillance !
Ce dimanche, nous sommes partis nous baigner près de Bidarray. Sitôt traversé le Pont d'Enfer, nous avons tourné à droite, puis franchi le Bastan, affluant de la Nive, sur ce drôle de petit pont au parapet monumental en arc de cercle d'au moins trois mètres de rayon et nous avons remonté la rive gauche. Depuis le petit pont qui les domine, nous avons admiré les gorges blanches aux vasques bouillonnantes creusées par l'action des galets emportés par les tourbillons liquides dans une danse giratoire : une année, nous y avions déjeuné sur les dalles en surplomb avant de nous adonner aux joies du rafting. De nombreuses voitures sont garées sur les étroits bas-côtés, et nous poursuivons sur la rive droite, également très encombrée. Certes, ce n'est pas la foule des plages de la côte basque, mais nous espérions être moins nombreux sur ce site enchanteur. Arrivés au pont suivant, nous nous décidons à stopper et nous nous garons en prenant garde à ne pas cogner nos roues aux rochers ni à verser dans le ravin. Rien n'est aménagé pour descendre à la rivière ; nous sommes chargés des ballots du pique-nique et la descente est malaisée, raide et glissante. Ensuite, il faut marcher sur les galets branlants, éviter de basculer dans l'eau en nous agrippant aux branches des arbustes qui retiennent lanières et vêtements de leurs rameaux crochus et franchir les racines aériennes sans déraper dans la poussière : une vraie expédition. Les premiers arrivés, installés en contrebas du pont, nous indiquent complaisamment un joli coin moins encombré vers l'aval. Nous suivons leur conseil, les enfants s'élancent avec ardeur et légèreté de pierre en pierre, les hommes derrière eux, tandis que les mères ferment la marche, lourdement chargées et plus maladroites sur ce terrain accidenté. Enfin, au détour d'un méandre, nous découvrons le paradis : personne d'autre en vue que les membres de notre petit groupe, deux piscines naturelles qui se succèdent, séparées par des barrages de galets coincés contre des rochers, creusés de passages où l'eau s'écoule en petites cascades, une falaise verdoyante sur l'autre rive, de l'herbe ombragée et des dalles larges et sèches où nous installer. Le rêve... Michèle, la première, s'enfonce dans l'eau fraîche jusqu'en haut des cuisses, puis ressort. Richard lui succède et marche de long en large afin d'habituer son corps qu'il plonge progressivement jusqu'à s'immerger totalement. Ensuite, il se garde d'en sortir et s'exclame à qui veut l'entendre qu'elle est délicieuse et que c'est un plaisir ! Il nage dans les eaux peu profondes parmi les petits poissons et s'allonge dans les rapides pour un massage énergique du dos et de la nuque. Son enthousiasme est communicatif. Bientôt tous les enfants sont à l'eau et Jean-Louis et moi tentons, lentement, de nous y mettre à notre tour. Sitôt déjeuné, les enfants partent en exploration, sautant de roche en roche. Lorsqu'ils reviennent, ils ont pris de l'assurance et apprivoisé l'eau froide, ils changent de rive et, du promontoire où Jean-Louis s'est installé pour lire à l'ombre de la falaise arborée, ils font un concours de plongeons. Michèle, Jean-Louis et moi découvrons les sensations mitigées d'un massage aquatique glacé - Richard nous a trouvé un endroit confortable où nous pouvons rester assis ou semi allongés sans trop déraper dans la violence du courant. L'eau s'écoule sur la nuque, les épaules, le dos, s'enfonce en une myriade de gouttelettes projetées comme des balles sur notre peau. Elle est très froide (sans doute d'environ 10 à 12°C), mais le mouvement et la vigueur du flot nous font supporter cette température, nous donnant presque une impression de chaleur sous l'action des jets multiples. Nous restons aussi longtemps que possible, davantage par bravade que pour le bien-être éprouvé, étonnés des capacités d'adaptation de nos corps respectifs. Toutes proportions gardées, je comprends maintenant pourquoi les Nordiques aiment à se plonger nus dans la neige après s'être baignés dans les eaux chaudes naturelles ou à la sortie du sauna. Le plaisir naît du contraste. Puis nous retournons nous allonger sur les serviettes, rapidement séchés par les rayons du soleil estival. Il est bientôt insupportable, et nous replongeons à plusieurs reprises pour nous rafraîchir. Dans l'intervalle, j'explore la vallée encaissée et traverse le torrent pour examiner sur l'autre rive la végétation particulière : les arbres ont pris racine dans la pente abrupte, redressant immédiatement leur tronc en une courbe élégante pour retrouver la verticalité, des lianes pendent en une longue chevelure verte, et la partie basse est tapissée d'une drôle de plante dont les feuilles accolées, sans tige, s'agrippent à la paroi verticale qui leur sert de support, mais où elles ne peuvent guère puiser de nourriture. Elles possèdent une rigidité minérale, plus semblable aux algues qu'aux plantes aériennes. Le soleil tourne et finit par se cacher derrière les hauteurs, plongeant notre havre de paix dans une pénombre trop fraîche qui nous incite à remballer nos affaires et partir à regret.

 

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