Ibos (10 Novembre 2003)

Pyrénées enneigéesLa collégiale d'IbosJ'essaie de vendre mon cd-rom sur la Lune dans tout le sud-ouest, ce qui m'a occasionné ce lundi un déplacement (fructueux) à Pau, puis à Tarbes. Depuis la réception de mes 20 cartons le 23 octobre, 50 cd (soit un carton entier) sur les 1000 fabriqués sont déjà distribués (donnés en remerciement de services ou vendus à la famille, aux amis, et aux premiers clients qui m'ont fait confiance). Je ne pense pas que j'arriverai à écouler les autres aussi rapidement, mais sait-on jamais...

La neige blanchit depuis quelques semaines déjà les cimes des Pyrénées au relief estompé par une brume légère. Parmi les tiges de maïs fanées qui jonchent un champ en attente de labour se dresse la silhouette gracile d'un échassier blanc, aigrette garzette perdue sur la route des migrations, solitaire, dont le cou tendu vers un ciel ennuagé semble quêter un appel d'un de ses congénères. La collégiale d'IbosDe brique et de pierre rouléePlus loin, de l'autre côté de l'autoroute, le corps brun massif d'un rapace des plaines se tient, immobile, sur un des poteaux du grillage. Faucon ou buse, celui-ci tourne le dos à la circulation des véhicules humains, l'oeil fixé sur les prés, champs et forêts, prêt à fondre sur tout lapereau ou campagnol.

En arrivant sur Tarbes, j'aperçois l'architecture monumentale de la collégiale gothique fortifiée d'Ibos, petit village dont une partie des champs fertiles est recouverte par le béton des "grandes surfaces", magasins entourés d'immenses parkings, de ronds-points et de bretelles d'accès qui cherchent à l'extérieur des villes des terrains bon marché. Ces constructions rapides déparent le paysage et contrastent avec le cachet d'un village aux murs couverts de mosaïques de galets où trône en son milieu une église surprenante, énorme, disproportionnée par rapport à la taille des maisons alentours, mais au chevet harmonieusement élancé vers le ciel.

Clef de voûte à l'effigie de Saint LaurentAprès avoir terminé mes occupations professionnelles, je me détends en m'accordant la visite de la collégiale. Fondée au XIVème siècle, elle allie avec bonheur la brique, le galet et la pierre. Je reprends ici la teneur des panneaux explicatifs situés dans le porche et sur le parvis. L'église d'Ibos n'est pas une cathédrale, aucun évêque n'y eut son siège. La tour ronde de l'escalierElle fut élevée au rang de collégiale en 1342 par Philippe VI de Valois, roi de France, et régent du Comté de Bigorre. Une collégiale était dotée d'un collège de chanoines qui, par leurs prières, représentaient la communauté des habitants devant Dieu et rehaussaient l'éclat des cérémonies religieuses. A la différence des chanoines du chapitre d'une cathédrale, ceux-ci ne participaient pas à l'élection de l'évêque. Elle conserva ce rang jusqu'à la révolution de 1789. En droit, elle n'a plus ce rang, mais, par fierté locale, les iboscéens ont fait revivre ce terme.

La collégiale d'IbosDétail du mur extérieur du chevetC'est la nef qui représente la partie la plus ancienne de l'édifice, de style gothique languedocien, avec sa large voûte haute d'une quinzaine de mètres. L'allure monumentale du chevet, mesurant 24,70 mètres de hauteur et surmonté d'un clocheton en éteignoir, contraste avec celle de la nef. Son aspect extérieur est souligné par des contreforts au sommet desquels ont été aménagés des postes de guet. Sa forme polygonale à sept pans est assez rare et chaque mur est ouvert de grandes baies à vitraux trilobés ou quadrilobés. Les pigeons apprécient également la collégialeToit pittoresqueQuant au clocher, c'est une tour porche carrée à quatre étages, dotée de contreforts massifs, dont la construction a dû certainement débuter au XVème siècle et s'achever au XVIIIème siècle, dont la face ouest est percée de trois petites fenêtres romanes. Dans la tourelle ronde de l'escalier, au revers de la dixième marche, est gravé le nom de l'un des maîtres d'oeuvre : Arnaud de Baleix.

Je fais le tour du bâtiment, admirant à tour de rôle cette église énorme et les maisons qui l'encadrent, dont les toits d'ardoise ou de lauzes parfois envahis de lichens et de mousses allient leur charme suranné aux murs recouverts de galets. J'adore ces vestiges des siècles passés, conservés et restaurés vaille que vaille par les propriétaires successifs, et qui ornent les villages au fin fond de nos campagnes, leur donnant un cachet que notre sobre modernité ne saura jamais égaler.

Toit moussu et mur de galetsD'après le site de Marie-Pierre Manet (http://membres.lycos.fr/mpmanet/infosibos.html), "Ibos fut l'une des six places fortes de la Bigorre pendant la guerre de Cent Ans, occupée par Montgomery puis par les Ligueurs au cours des guerres de religion. Mur orné de galetsAu Moyen Age, elle était la 6ème ville de Bigorre après Tarbes, Bagnères, Lourdes, Vic et Rabastens. A la fin du XIIème siècle, elle reçut une charte d'affranchissement et su tirer parti de sa position de ville-frontière proche du Béarn. La riche architecture bigourdane du village et son imposante collégiale témoignent d'un passé florissant où le commerce, l'agriculture et la forêt ont joué le plus grand rôle."

Le chevet à 7 pansUn autre site (http://www.ville-ibos.fr/history.htm) donne un peu plus de détails. "IBOS, primitivement IVOS, à six kilomètres à l’ouest de TARBES, était autrefois la grande commune des Hautes-Pyrénées par sa superficie (2 fois celle de Tarbes), l’une des six villes maîtresses que comptait la Bigorre et comme telle, possédait une cour comtale. Situé face à la chaîne des Pyrénées, le très vaste territoire d’IBOS (3.800 ha) se compose de deux éléments géographiques différents et complémentaires : A l’Ouest, il déborde sur le plateau de GER longtemps couvert de landes et qui attira le premier peuplement humain du site, dont témoignent des tumuli protohistoriques (ou tombes) bâtis en dômes avec des galets et de la terre, au-dessus ou non des foyers d’incinération des corps. Le défrichement récent des landes pour développer la culture du maïs, les a nivelés. Contemporain de ces tumulus se dressait un oppidum, sur une butte naturelle, aménagée en place forte. A l’Est, le territoire d’IBOS s’étale sur une large terrasse alluviale de l’ample vallée de l’Adour. Maison bigourdineA 320 m d’altitude, cette terrasse domine de dix mètres le site de TARBES. Elle a joué un rôle vital dans le cadre d’une économie d’autosuffisance vivrière à base de polyculture car elle compte les meilleurs sols de la commune.

Le chevet de Aussi, elle porte fièrement l’église du lieu, qui au-delà des siècles, indique toujours le noyau médiéval, délimité par des rues concentriques, tracé hérité des fortifications disparues et à partir duquel rayonnent les voies qui relient IBOS aux communes limitrophes.
En lisant cette organisation séculaire de l’espace urbain, on peut retrouver quelques étapes majeures de la ville d’IBOS qui eut de l’importance en Bigorre, dont le Comte CENTULLE III lui octroya la charte de franchise vers 1171, à peu près en même temps qu’aux principales villes du comté. Dès lors, deux consuls d’IBOS eurent droit d’entrée aux États de Bigorre où le Tiers État comptait seulement 29 représentants."