J'essaie
de vendre mon cd-rom sur la Lune dans tout le sud-ouest, ce qui m'a occasionné
ce lundi un déplacement (fructueux) à Pau, puis à Tarbes. Depuis la réception
de mes 20 cartons le 23 octobre, 50 cd (soit un carton entier) sur les
1000 fabriqués sont déjà distribués (donnés en remerciement de services
ou
vendus à
la famille,
aux amis, et aux premiers clients qui m'ont fait confiance). Je ne pense
pas que j'arriverai à écouler les autres aussi rapidement, mais sait-on
jamais...
La
neige blanchit depuis quelques semaines déjà les cimes des Pyrénées
au relief estompé par une brume légère.
Parmi les tiges de maïs fanées qui jonchent un champ en attente de
labour se dresse la silhouette gracile d'un échassier blanc, aigrette
garzette perdue sur la route des migrations, solitaire, dont le cou
tendu vers un ciel ennuagé semble quêter un appel d'un de ses congénères.
Plus loin, de l'autre côté de l'autoroute, le corps brun massif d'un
rapace des plaines se tient, immobile, sur un des poteaux du grillage.
Faucon
ou buse, celui-ci tourne le dos à la circulation des véhicules humains,
l'oeil fixé sur les prés, champs et forêts, prêt à fondre sur tout
lapereau ou campagnol.
En arrivant sur Tarbes, j'aperçois l'architecture monumentale de la collégiale gothique fortifiée d'Ibos, petit village dont une partie des champs fertiles est recouverte par le béton des "grandes surfaces", magasins entourés d'immenses parkings, de ronds-points et de bretelles d'accès qui cherchent à l'extérieur des villes des terrains bon marché. Ces constructions rapides déparent le paysage et contrastent avec le cachet d'un village aux murs couverts de mosaïques de galets où trône en son milieu une église surprenante, énorme, disproportionnée par rapport à la taille des maisons alentours, mais au chevet harmonieusement élancé vers le ciel.
Après
avoir terminé mes occupations professionnelles, je me détends en m'accordant
la visite de la collégiale.
Fondée au XIVème siècle, elle allie avec bonheur la brique, le galet
et la pierre. Je reprends ici la teneur des panneaux explicatifs situés
dans le porche et sur le parvis. L'église
d'Ibos n'est pas une cathédrale, aucun évêque n'y eut son siège.
Elle
fut
élevée
au
rang
de collégiale
en
1342 par
Philippe VI de Valois, roi de France, et régent du Comté de Bigorre.
Une collégiale était dotée d'un collège de chanoines qui, par leurs
prières, représentaient la communauté des habitants devant Dieu et
rehaussaient l'éclat des cérémonies religieuses. A la différence des
chanoines du chapitre d'une cathédrale, ceux-ci ne participaient pas
à l'élection de l'évêque. Elle conserva ce rang jusqu'à la révolution
de 1789. En droit, elle n'a plus ce rang, mais, par fierté locale,
les iboscéens ont fait revivre ce terme.
C'est
la nef qui représente la partie la plus ancienne de l'édifice, de style
gothique languedocien, avec sa large
voûte haute d'une quinzaine de mètres. L'allure monumentale du chevet,
mesurant 24,70 mètres de hauteur et surmonté d'un clocheton en éteignoir,
contraste avec celle de la nef. Son aspect extérieur est souligné par
des contreforts au sommet desquels ont été aménagés des postes de guet.
Sa forme polygonale à sept pans est assez rare et chaque mur est ouvert
de grandes baies à vitraux trilobés ou quadrilobés.
Quant
au clocher, c'est une tour porche carrée à quatre étages, dotée de contreforts
massifs,
dont la construction a dû certainement débuter au XVème siècle et s'achever
au XVIIIème siècle, dont la face ouest est percée de trois petites fenêtres
romanes. Dans la tourelle ronde de l'escalier, au revers de la dixième
marche, est
gravé
le nom
de l'un
des maîtres
d'oeuvre
:
Arnaud
de Baleix.
Je fais le tour du bâtiment, admirant à tour de rôle cette église énorme et les maisons qui l'encadrent, dont les toits d'ardoise ou de lauzes parfois envahis de lichens et de mousses allient leur charme suranné aux murs recouverts de galets. J'adore ces vestiges des siècles passés, conservés et restaurés vaille que vaille par les propriétaires successifs, et qui ornent les villages au fin fond de nos campagnes, leur donnant un cachet que notre sobre modernité ne saura jamais égaler.
D'après
le site de Marie-Pierre Manet (http://membres.lycos.fr/mpmanet/infosibos.html),
"Ibos fut l'une des
six places fortes de la Bigorre pendant la guerre de Cent Ans, occupée
par Montgomery puis par les Ligueurs au cours des guerres de religion.
Au
Moyen Age, elle était la 6ème ville de Bigorre après Tarbes, Bagnères,
Lourdes, Vic et Rabastens. A la fin du XIIème siècle, elle reçut une
charte d'affranchissement et su tirer parti de sa position de ville-frontière
proche du Béarn. La riche architecture bigourdane du village et son
imposante collégiale témoignent d'un passé florissant où le commerce,
l'agriculture et la forêt ont joué le plus grand rôle."
Un
autre site (http://www.ville-ibos.fr/history.htm) donne un peu plus
de détails. "IBOS,
primitivement IVOS, à six
kilomètres à l’ouest de TARBES, était autrefois
la grande commune des Hautes-Pyrénées par sa superficie
(2 fois celle de Tarbes), l’une des six villes maîtresses
que comptait la Bigorre et comme telle, possédait une cour comtale.
Situé face à la
chaîne des Pyrénées, le très vaste territoire
d’IBOS (3.800 ha) se compose de deux éléments géographiques
différents et complémentaires : A
l’Ouest, il déborde
sur le plateau de GER longtemps couvert de landes et qui attira le
premier peuplement humain du site, dont témoignent des tumuli
protohistoriques (ou tombes) bâtis en dômes avec des
galets et de la terre, au-dessus ou non des foyers d’incinération
des corps. Le défrichement récent des landes pour développer
la culture du maïs, les a nivelés. Contemporain de ces
tumulus se dressait un oppidum, sur une butte naturelle, aménagée
en place forte. A
l’Est, le territoire d’IBOS s’étale sur
une large terrasse alluviale de l’ample vallée de l’Adour.
A 320 m d’altitude, cette terrasse domine de dix mètres
le site de TARBES. Elle a joué un rôle vital dans le
cadre d’une économie d’autosuffisance vivrière à base
de polyculture car elle compte les meilleurs sols de la commune.
Aussi, elle porte fièrement l’église du lieu,
qui au-delà des siècles, indique toujours le noyau
médiéval, délimité par des rues concentriques,
tracé hérité des fortifications disparues et à partir
duquel rayonnent les voies qui relient IBOS aux communes limitrophes.
En lisant cette organisation séculaire de l’espace urbain, on peut
retrouver quelques étapes majeures de la ville d’IBOS qui eut de
l’importance en Bigorre, dont le Comte CENTULLE III lui octroya la charte
de franchise vers 1171, à peu près en même temps qu’aux
principales villes du comté. Dès lors, deux consuls d’IBOS
eurent droit d’entrée aux États de Bigorre où le Tiers État
comptait seulement 29 représentants."