Migration d'automne

L'automne arrive à pas menus, un peu de frimas, puis le vent du sud qui surprend la nature rougissante à darder ses derniers fleurons odorants que butinent les bourdons.

Par un beau soir d'une douceur infinie, une lune dorée s'élève au-dessus des toits de Bayonne, non loin des flèches illuminées de la cathédrale dont la sveltesse fait ressortir cette rondeur imposante suspendue dans le noir.

Plus tard, mon pied trébuche contre une masse informe : c'est le crapaud familier qui niche sous les dalles et s'éloigne, indigné, en lourds bonds courts et lents.

La lune gonfle et aspire alternativement l'eau de la mer qui révèle en se retirant des bans de muges au ras des flots qui gobent l'écume en remontant les vagues et disparaissent soudain sous un écran de bulles.

En remontant la côte vers le village d'Arcangues par une route étroite enfouie dans la chênaie, l'herbe qui bordait la chaussée était envahie de colchiques, tapisserie d'automne au point de croix serré, où l'oeil ne savait distinguer si le mauve était enchâssé de vert, ou bien le vert serti d'un écrin mauve.

Alors que les chasseurs canardaient sans vergogne près des maisons et de l'aéroport, la lune se couchait, sereine, guidant sans le savoir un vol de grands oiseaux en formation serrée qui pointaient vers le sud dans une aube naissante.