« Petite fille, je passais mon temps à changer le mobilier de place et à modifier la décoration de la maison ». Maintenant, Anouk de Saulce Latour a depuis 9 ans son propre atelier, Anouk Décor, en plein centre du bourg de Bassussarry. Cela n’a pas été sans peine. Ses études ont été écourtées pour raisons de santé, elle a fait de nombreux petits boulots avant de trouver un travail d’assistante vétérinaire qui lui a beaucoup plu pendant 3 ans. Puis elle a vu travailler un tapissier dans Biarritz et elle a souhaité apprendre le métier. Elle est revenue tous les jours, l’a aidé (d’abord gratuitement) dans les tâches les plus ingrates : « Les débuts étaient décevants, je ne faisais que du dégarnissage et du nettoyage, pendant 2 ans je n’ai pas touché un bout de tissu, mais c’est en démontant les fauteuils que l’on apprend comment ils sont faits ». Puis, à 22 ans, elle est repartie à zéro, a passé le CAP-BEP en 3 ans à Mont de Marsan puis le BM (brevet de maîtrise) en un an tout en poursuivant son apprentissage à Biarritz.

Risque. Comme elle avait plus de maturité que les autres élèves, elle a mené de front les deux sections possibles, couture et ‘garniture et décor’, elle a pris goût à l’histoire, vue sous l’angle de l’art du mobilier, de la décoration intérieure et des styles, et s’est mise au dessin. Son patron ayant pris sa retraite, elle songea à s’installer. Réflexion faite, il n’était pas nécessaire qu’elle soit en ville, il n’y avait pas de local à Arcangues où habitaient ses parents, par contre Bassussarry en proposait deux à l’achat. C’était un gros risque pour elle : elle demanda qu’on lui accorde dans un premier temps un bail précaire de 2 ans pour voir si les affaires démarraient, puis elle acheta le local grâce à un prêt à taux préférentiel pour création d’entreprise.
Depuis, elle a fait son chemin, elle a retapissé 200 fauteuils du Casino de Biarritz, elle a eu pour clients les chaussures Boutin, le Grand Hôtel à Bayonne, et beaucoup de particuliers, par le bouche à oreille.

Une entreprise d’accueil
Peut-être est-ce ce parcours chaotique qui a éveillé chez Anouk de Saulce Latour son envie d’aider les jeunes à trouver leur voie. Elle adore les recevoir dans son atelier pour leur expliquer son travail et leur faire faire de petites tâches de façon à ce qu’ils puissent avoir une idée du métier. Elle les prend pendant quelques jours lorsqu’ils font leur stage en classe de 3ème, ou bien par séquence de 70 à 80 heures, lorsqu’ils sont envoyés en stage de découverte des métiers par l’ANPE pour être évalués en milieu du travail. D’autres organismes comme le Fongecip, l’AFPA ou l’APEC font également appel à ses services pour des durées de stage allant jusqu’à 10 mois de formation. Mais ces délais de formation sont insuffisants, le jeune n’a pas assez confiance en lui pour se lancer seul, il ne faut pas lui donner des illusions. « J’ai failli embaucher une jeune fille, une fois, apparemment très motivée, mais elle est tombée enceinte et elle a dû abandonner une carrière prometteuse. J’ai eu ensuite un jeune qui cherchait juste à gagner du temps, il a étalé ses 15 jours de stage sur un mois pour percevoir ses indemnités, il fallait que j’appelle chez lui le matin pour lui rappeler de se lever, il arrivait à 11h au lieu de 8h ! ». Mais ces cas ne la découragent pas, elle cherche maintenant à faire agréer son entreprise comme prestataire de formation.

SOMMAIRE

 


Cathy Constant-Elissagaray, correspondante locale au journal Sud-Ouest pour les villages de Bassussarry et d'Arcangues

Article paru le jeudi 4 mars 2006 : "Maîtresse de maison"