Les bénévoles Sophie et Vincent récupèrent les dernières anguilles dans la vase. C.C-E
« La destinée normale d’un étang creusé en amont d’un moulin est de s’envaser. Il faut donc périodiquement le vider pour le curer » explique Tangi Le Moal, responsable local du Conservatoire Régional des Espaces Naturels d’Aquitaine (CREN) qui assure la gestion de la réserve naturelle de Chourroumillats. « Nous avons constaté depuis son dernier assèchement en 2001 qu’il se comblait trop rapidement, en raison de la transformation du bassin versant. Les terres autrefois couvertes de forêts, de landes à fougères et de prairies naturelles sont actuellement laissées une grande partie de l’année à nu, le maïs ne les couvrant que durant la période estivale, et elles subissent de ce fait une érosion accélérée » ajoute-t-il. Il est entré en contact avec les agriculteurs, conscients de ces conséquences néfastes, et il étudie avec eux les solutions possibles. Cette réserve naturelle, propriété de la famille Guilhous, est en passe d’être classée « Réserve naturelle régionale » par le Conseil Régional, statut qui lui assurera une certaine protection, notamment si des travaux d’envergure devaient être entrepris à proximité (par exemple, la Ligne à Grande Vitesse), afin de préserver le débit des ruisseaux et d’aménager des passages pour la libre circulation de la faune.
« L’envasement faisait disparaître l’herbier qui remplit de nombreuses fonctions : il permet une bonne oxygénation de l’eau, poissons, insectes, batraciens et oiseaux y déposent leurs œufs et s’en nourrissent, c’est également un lieu de refuge pour échapper aux prédateurs » poursuit Tangi Le Moal. « Nous profiterons de l’assèchement pour reprofiler le lit de l’étang, adoucir la forme des berges, créer une platière pour les oiseaux, zone où l’eau ne dépassera pas une dizaine de centimètres de profondeur, ainsi que des régions plus profondes qui assureront une fraîcheur relative recherchée par certains poissons » ajoute Michel Guilhous. Depuis une douzaine de jours, il procède au vidage progressif de l’étang en retirant une à une au fond d’une sorte de puits les planches qui permettent la régulation du niveau de l’eau. « Ce faisant, nous avons pêché pour les détruire un maximum d’individus appartenant à deux espèces invasives, la très agressive écrevisse de Louisiane et la vorace perche-soleil, ou calicoba, dotée d’une dangereuse épine dorsale qui la rend peu appétissante pour ses prédateurs éventuels, et qui prolifère en quantité en dévorant les œufs des autres poissons. Malgré tout, l’étang dispose d’une bonne répartition de poissons, depuis les poissons-fourrage, poissons blancs herbivores, gougeons, rotangles, carpes, carassins, gardons, en passant par l’anguille et jusqu’au roi des eaux douces, le brochet, dont la mâchoire est dotée de 700 dents – il y en a même dans ses ouïes !- et que l’on trouve aussi bien très jeune, fingerling minuscule de quelques grammes, ou bien adulte. Le plus gros répertorié atteignait 84 cm et 1,354 kg » constate Tangi Le Moal. Après ces travaux et la minéralisation de la vase au contact de l’air, l’étang se remplira de nouveau à l’automne prochain et se repeuplera naturellement.
Cathy Constant-Elissagaray

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Photos

 

Cathy Constant-Elissagaray, correspondante locale au journal Sud-Ouest pour les villages de Bassussarry et d'Arcangues

Article paru le 8 août 2009 : "A Chourroumillas, l'étang est asséché"