C'est
à l'occasion d'un déplacement à Madiran pour accompagner
Jonathan qui participait à un match de hand-ball, que j'ai visité
ce village, situé tout au bout du département, à deux
heures de route d'Anglet, et surtout son église du XIe s. qui trône
en son milieu. Madiran est surtout connu bien sûr pour son vin. La vigne
est cultivée sur les coteaux environnants depuis le 1er siècle
avant J.-C., comme en témoigne une mosaïque décorant le
sol d'une ancienne villa romaine maintenant disparue, située non loin
du village, et sur laquelle figure l'évocation de la vigne (et du vin
?) (information donnée par Madame la Mairesse, qui assistait cet après-midi
aux matches des équipes locales et qui regrettait de manquer de moyens
pour pouvoir poursuivre les fouilles et découvrir d'autres vestiges
de l'antique Novempopulanie).
Du
propre aveu de cette dernière, aucun effort n'est fait en direction
d'éventuels touristes ou visiteurs occasionnels pour promouvoir les
curiosités architecturales. Et c'est bien dommage ! Il existe quelques
châteaux et belles demeures dans un rayon d'une cinquantaine de kilomètres,
mais rares sont les possibilités de les visiter : elles sont du domaine
privé. De toutes les façons, j'avais déjà fait
deux heures de trajet pour parvenir jusqu'à Madiran, et je n'avais
guère envie de reprendre la voiture. Madiran est très mal signalé
: nous avons constitué un petit convoi de quatre voitures et suivions
la première dont le chauffeur connaissait déjà (à
peu près) le chemin -
autoroute
de Pau, sortie Pau, direction Morlaas, puis Lembeye, au nord de Pau. Arrivés
à Lembeye, il a fallu demander notre chemin, car nous étions
en train de prendre la direction de Vic, alors qu'il fallait tourner à
gauche sur la place principale et suivre la direction d'Aire sur Adour sur
quelques kilomètres et obliquer à droite vers Madiran, enfin
signalé... : le bout du monde, un village sur les hauteurs, au milieu
d'un paysage vallonné de bocage, alternance de cultures et de forêts,
où la vigne que je guettais se faisait rare, dispersée et perdue
au milieu des champs de maïs, quelques belles demeures, mais pas de châteaux
comme dans le Bordelais.
Jonathan
était déjà venu à Madiran et se souvenait qu'il
avait dû jouer dehors, faute de locaux adaptés. Aujourd'hui,
une belle salle de sport se dresse à côté de la piscine
découverte et d'un petit club-house. Je suis accueillie par un groupe
d'adultes qui s'affaire à couper les longs cakes en tranches pour les
jeunes poussins ou benjamins qui viennent de terminer leur match. Une fois
disposés les verres en plastique et les grandes bouteilles de coca
ou jus de fruit, on me propose un café odorant. Des bouteilles de Madiran
et de Pacherenc trônent sur le comptoir. Il n'est malheureusement pas
question d'y goûter, je dois assurer le retour en voiture avec la responsabilité
du transport de cinq enfants.
Sur
les conseils de mes mentors, et pendant que les jeunes s'échauffaient
avant le match, je suis donc partie à pied à travers les rues
du village, remarquant de-ci, delà, quelques vestiges des temps passés
gardés encore vivaces : un puits surmonté d'un vieux chaudron
laqué de noir, équipé d'une pompe manuelle, une ruelle
pavée de galets qui longe une halle couverte d'un toit à la
charpente apparente qui supporte des tuiles plates, le prieuré en face
de l'église, transformé en hôtel-restaurant dans la partie
du bâtiment la plus longue, tandis que l'autre, perpendiculaire, est
investie par la Maison des Vins.
Mais
la pièce maîtresse du village, c'est son église, datée
du XIème siècle sur un panneau signalétique, mais dont
la construction a manifestement été échelonnée
sur plusieurs siècles. Le clocher ressemble à un donjon, imposante
tour carrée étayée de contreforts massifs et moussus
; il a été reconverti en pigeonnier et ses murs sont percés
d'une multitude d'ouvertures pour héberger le vol de pigeons qui tournoie
dans un bel ensemble au-dessus de ma tête. L'horloge a été
installée à la va-vite, sans souci de restituer au clocher son
apparence première : une poutre de soutien a été dressée
dans un creux vertical ménagé dans l'épaisseur du mur,
qu'aucune pierre n'est venue recouvrir, ni le moindre crépis. Soit
dit en passant, ses rouages doivent être solides, car la cloche qui
sonne 5 heures me fait sursauter, et l'horloge toute proche doit vibrer, frappée
de plein fouet par les ondes sonores.