J'adore
découvrir ainsi un pays. J'ignore combien de personnes cheminent comme
nous en même temps. Parfois (pas souvent), je dépasse quelques pèlerins,
ou des pèlerins
me doublent, d'un pas décidé (beaucoup plus fréquemment), et toujours,
nous nous saluons, "Ola, Hello, Bonjour
!". La gamme d'âge est aussi étendue que celle des randonneurs en montagne,
et bien que l'ensemble soit manifestement en forme, certains affichent
un physique enrobé et marchent en soufflant.
Au fur et à mesure de
notre progression, nous nous faisons klaxonner par de plus en plus
de pèlerins cyclistes qui nous saluent d'un "Buen camino !" en se frayant
un passage
entre
nous. Dans les montées, ils peinent, mais je les envie un peu lorsqu'ils
filent dans les descentes, les bagages portés par le vélo et le dos
libre de toute entrave.
Les Espagnols sont probablement majoritaires,
mais nous rencontrons également un Belge, un Français,
deux Suisses, deux Autrichiennes, deux Allemands, des Anglaises d'origine
polonaise à la
peau claire marbrée de rouge par les coups de soleil, avec
lesquelles j'ai lié
conversation
car je reconnaissais quelques mots
russes...
Elles s'humectent en riant sous le jet d'eau rotatif qui arrose un
champ de betteraves, sans même ôter leur sac à dos. Elles
me parlent anglais, français et j'alterne aussi les deux langues
pour leur répondre, sans y prendre
garde. J'ai vu un ou deux couples, mais, plus souvent, il s'agit de
personnes seules,
ou
en groupe
de
2 ou 3
de même
sexe.
J'ai
l'impression que certains groupes se font au hasard des rencontres,
puisque en bavardant on découvre que tous les membres n'ont
pas démarré
du même
endroit. Un des Suisses est parti de Fribourg (le terrain était
plat, en faisant le tour du lac Léman), Jérôme,
le jeune Belge, de Pampelune (quelqu'un lui a déconseillé de
franchir les Pyrénées,
à cause de
son manque d'entraînement
dans son plat pays), une Autrichienne de Saint Jean Pied de Port, comme
Richard et Max.
Nous
nous demandions s'il serait plus ennuyeux de parcourir ces hauts plateaux
que nos montagnes pyrénéennes, mais en fait il n'en
est rien. Contrairement à nos prévisions les plus pessimistes,
la chaleur n'est pas caniculaire, quelques nuages sillonnent le ciel,
de plus
en plus denses en nous approchant de Burgos, et le temps fraîchit
progressivement (de plus de 30° à 23°) sur les quatre
jours. Les vignes des premières
heures sont remplacées par des champs de blé, moissonnés
tantôt dans
un sens, tantôt dans l'autre, formant un damier rayé blond
sur les ondulations du relief. Les nuages glissent dessus et créent
des jeux d'ombre et de lumière du plus bel effet. Nous passons
par un point culminant à
plus de mille mètres, ce qui explique la douceur relative de
la température
lorsque nous traversons un bois de pins aux troncs rouges qui alterne
avec une chêneraie d'arbres gringalets et tortueux trop proches
pour se développer pleinement, entre lesquels jaillissent des
milliers de nouvelles pousses. Ces forêts sont claires et gaies,
très différentes
des nôtres. En redescendant, nous retrouvons les blés
et des potagers irrigués, avant d'entrer dans la longue zone
industrielle et artisanale de Burgos.
Le
premier gîte, à Santo Domingo de la Calzada, est très
agréable. Situé
dans une des grandes bâtisses de pierre dans
l'enceinte de la vieille ville, non loin de la cathédrale qui
garde toujours à l'intérieur dans une sorte de niche
à mi-hauteur un coq et une poule, vivants, en souvenir de la
légende
du jeune homme ressuscité
comme les volailles du repas du Corregidor.
Une
pièce immense contient
plusieurs enfilades de lits espacés donnant au fond sur une
porte ouverte sur un jardin où des pèlerins se reposent,
allongés sur la pelouse.
D'autres utilisent les bacs le long du mur pour laver leur
linge. Nous nous empressons de nous rafraîchir dans les douches
impeccables mises
à notre disposition (une salle pour les hommes, une autre pour
les femmes), et partons à la découverte de la ville (et
d'un restaurant sympa pour le dîner). Extinction des feux obligatoire à 22
heures, car les premiers pèlerins commencent à se préparer
silencieusement avant l'aube, sans doute vers 6 heures du matin, pour
profiter de la fraîcheur. Pas de ronflements, pas
de bavardages nocturnes ni de bruits intempestifs, c'est une collectivité
très particulière, respectueuse du sommeil des autres,
qui nous entoure.
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Participants : Richard, Max, Xavier C., Jean-Louis, Cathy Date : 25 au 28/07/2005 |
Sur les chemins de Saint Jacques de
Compostelle |
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