Nous
arrivons en vue du col de Meatze et n'osons pas descendre : des coups
de fusil résonnent, quelques voitures sont garées là, nous craignons
de ne pas être les bienvenus. Nous décidons de nous promener dans un
endroit plus calme et faisons demi-tour en direction de l'Adarza. Nous
passons près de quelques chasseurs sans fusil venus simplement rafistoler
leur palombière avant la saison qui arrive. Ils se gardent bien de
nous saluer et font comme si nous n'existions pas. Je n'ai jamais vu
ça : d'ordinaire, tout le monde se salue, en montagne comme à Chiberta
quand nous faisons notre footing ou dans les rues d'Anglet lorsque
je suis à vélo. Ce sont des rustres.
Nous
sommes dans une zone de hêtraies : la forêt d'Haïra
est la plus grande. Nous pique-niquons à l'abri du vent à l'orée
d'un bois, avec vue sur les montagnes de l'autre côté d'une
vallée. Puis nous reprenons notre marche sur le sentier de
crête où alternent
des endroits abrités ou ventés. Les oiseaux
planeurs se sont réveillés
: au-dessus de nos têtes évoluent les vautours fauves
et des oiseaux plus petits, aux ailes plus effilées et à la
queue fourchue, peut-être
des milans.
Des
hirondelles rasent l'herbe tandis que des vols de choucas criards passent
en désordre, acrobates virtuoses qui semblent
se jouer du vent. Parfois, un oiseau fait du surplace, spectacle toujours étonnant
d'une vaste masse d'air en mouvement incapable de bousculer cette boule
de plumes aux ailes profilées. Que j'aimerais évoluer
en parapente
à leur côté, au-dessus de ce vallonnement coloré !
J'étends mes bras
et le vent me pousse, il ne faudrait pas grand chose pour les rejoindre...
En bordure de bois, nous voyons deux cèpes à capuchon clair et dessous jaune, comestibles mais pas des meilleurs. Des colchiques pointent entre les fougères, tandis que l'herbe est parsemée de petites fleurs jaunes (peut-être des ficaires, mais je ne suis pas sûre). Sur les pentes, les ajoncs ont survécu aux précédents écobuages : ils tendent quelques branches calcinées vers le ciel tandis que de leur pied renaît une boule de rameaux vert sombre hérissés piquetés de fleurs jaunes.
L'avantage
de l'élevage extensif, c'est qu'il n'engendre pas de pollution par
concentration excessive de bétail. L'herbe pas trop piétinée n'a pas
besoin d'être semée, les bouses des vaches déjà redescendues dans les
vallées ont presque fini d'être converties en humus léger, de petits
champignons se
nourrissent
des
crottes de
brebis rapidement elles aussi transformées en engrais naturel qui se
dissout parmi les brins d'herbe alors que celles qui sont encore fraîches
attirent à la curée des myriades
de mouches et autres
insectes (dont se nourrissent les hirondelles)... et le vent toujours
actif emporte
les odeurs qui pourraient être incommodantes pour le promeneur du dimanche
aux endroits où les brebis se regroupent pour
dormir la nuit.
Des
mottes d'herbe retournées sur une bonne surface indiquent le passage
d'un sanglier : là encore, l'alternance de
forêts et de pâturages permet aux animaux sauvages de survivre malgré
la
grande fréquentation humaine (et les tirs des chasseurs pendant quelques
mois). Je me demande toujours où ils peuvent bien se cacher. Lorsque
nous marchons,
nous
voyons toujours les mêmes sortes d'animaux, et une quantité reste à
jamais invisible. Pas
de mammifères (à part les marmottes et les isards en altitude, quand
nous sommes chanceux), quelques
oiseaux, mais beaucoup restent cachés, quelques lézards,
sinon aucun
reptile, quelques tétards, mais rarement des batraciens adultes, etc.
Il faudrait rester immobile, et guetter particulièrement tôt le
matin et à la tombée de la nuit, peut-être ? C'est là où l'on s'aperçoit
du tour de force des réalisateurs de documentaires animaliers : quelle
patience et quelle science !
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Michèle, Richard, Cathy et Jean-Louis | Col de
Meatze - Adarza |
8 octobre 2006 |