L'ancien pontNous devinons la proximité de villages cachés au fond de vallées lorsque nous apercevons sur les hauteurs des champs d'éoliennes. L'Espagne se classe au deuxième rang international après l'Allemagne dans le domaine de l'énergie éolienne. Ceci s'explique par les conditions politiques favorables et le potentiel existant de vent fort. Selon les termes du Protocole de Kyoto, le plan d'énergie national prévoit une expansion de la capacité de l'énergie éolienne qui atteindra 9000 MW avant 2010. A voir la densité faible des pylônes et la lenteur de rotation de leurs trois pales, nous nous demandons quelle est l'efficacité réelle de ces modernes moulins à vent. En fait, les pales entraînent un générateur par l'intermédiaire d'un multiplicateur de vitesse qui fait passer la fréquence de rotation de 19-30 révolutions par minute à environ 1500 révolutions par minute. En cas de vent violent, un frein à disque limite la fréquence de rotation pour ne pas forcer le générateur. Les grandes éoliennes démarrent lorsque le vent atteint environ 20 km/h. La puissance optimale est obtenue avec un vent de 50 km/h et aux environs de 90 km/h, l'éolienne se met en veille pour éviter tous problèmes mécaniques. Durant tout notre périple, nous les avons vues fonctionner au loin : le temps était propice.

Le nouveau pontLes écologistes sont partagés sur cette nouvelle source d'énergie : certains mettent en exergue un accident intervenu le 9 décembre 2000 près de Burgos, où le mât de plus de cinquante mètres a été plié et les pales déchiquetées projetées par un vent violent à près d'un kilomètre de là après avoir traversé une route. Ils protestent également contre leur emplacement sur des zones migratoires d'oiseaux qui, notamment la nuit, ne pourraient pas éviter ces obstacles (étude en 2000 par un biologiste indépendant sur la mortalité des oiseaux et chauve-souris à cause d'éoliennes implantées en Navarre). Le problème de la nuisance sonore est aussi évoqué, quoiqu'il ne me paraisse pas pertinent, étant donné leurs emplacements très isolés sur des promontoires incultes à l'écart des habitations. En outre, le bruit dépend bien sûr de la taille de l'éolienne, car il en existe une grande variété. Nous sommes passés sur un pont dont la circulation alternée était commandée par un feu tricolore alimenté de façon mixte par un panneau solaire surmonté d'une petite éolienne tournant à toute vitesse parfaitement silencieusement.

Ruines du Couvent de San AntónC'est finalement très agréable de marcher en cette saison, malgré la fraîcheur matinale, les journées courtes, la crainte permanente de la pluie et les "albergues" fermées qui imposent de longues étapes. Nous nous retrouvons complètement seuls à marcher pendant des heures sur les chemins, simples pistes agricoles hors de vue des routes goudronnées. Les oiseaux apprécient beaucoup le travail des champs et pépient, invisibles entre les mottes de terre. A proximité de Castrojeriz, ils se comportent comme des bancs de poissons et s'envolent brusquement, masse palpitante et bruissante aux mouvements coordonnés, avec des virages secs ou amples, jusqu'à se poser quelques kilomètres plus loin, trop rapides pour que je puisse saisir l'instant avec mon appareil photo.

Les villages rares et les paysages faiblement vallonnés ou même parfaitement plats permettent au regard d'apprécier à sa juste valeur le mot "immensité". Au rythme de nos pas, nous arpentons la terre et prenons pleinement conscience de sa taille et du temps qu'il faut pour la parcourir : 20 kilomètres la première après-midi, 86 kilomètres au total sur les trois jours jusqu'à Carrión de los Condes, nous ne sommes pas encore rendus à St Jacques de Compostelle. CastrojerizNous prenons le rythme et regrettons de devoir nous arrêter en si bon chemin. Ce doit être agréable de partir ainsi durant un mois, un mois et demi, en nous ménageant régulièrement une après-midi ou une journée de repos. Je suis sûre que nous souffririons moins des muscles avec cet entraînement régulier. Quant aux ampoules, c'est une autre paire de manches : cette fois, c'est Jean-Louis et Richard qui en ont souffert et ont profité de mon expérience passée (et de ma prévoyance) pour appliquer dessus cette "seconde peau", pansement qui résorbe le gonflement sans qu'on soit obligé de percer la peau et de se blesser. Enfin, le mieux, c'est tout de même d'alterner deux sortes de chaussures pour éviter des frottements intempestifs toujours aux mêmes endroits (ce que j'ai fait).

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Richard, Max, Jean-Louis B., Cathy et Jean-Louis
Sur les chemins de St Jacques de Compostelle
Mardi 31 octobre au vendredi 3 novembre