J'ai
une prédilection pour les petites bêtes. Je les trouve toujours beaucoup
plus minutieusement "travaillées" que les grosses. J'ai encore en mémoire
la parure symétrique des petits poissons, aux motifs finement tracés
en un entrelacs compliqué et nuancé, les yeux cernés de couleurs vives
jaune ou rouge, les bancs de minuscules poissons au dos violet et ventre
bleu-roi,
lumineux et souplement mobiles. Je revois un groupe de poissons bruns,
de 5 à 10 cm (c'est difficile à évaluer sous l'eau, tout est grossi comme
sous une loupe), au milieu duquel j'ai vu jaillir soudain un brusque
jet puissant tout blanc d'un à deux cm de longueur : c'est alors que
j'ai
compris
que l'un
d'entre
eux était une toute petite seiche qui est partie, bien sûr, à reculons,
et j'ai pu distinguer ses tentacules très courts et son corps ovoïde. Le temps
de lever la tête pour dire à Jean-Louis de venir l'admirer, elle s'était
évanouie
dans
la
nature.
Sur
l'autre côté du promontoire exposé à de bonnes vagues, c'est une pieuvre
que j'ai surprise au milieu
d'une cour de poissons peut-être avides de gober les reliefs de son
repas. Essayant de m'approcher discrètement par derrière, elle m'a tout
de même
aperçue
et, plus intelligente
que
ses
compagnons,
elle a étiré avec grâce ses tentacules et en un rien de temps a disparu
sous une roche. J'ai eu beau tourner autour un moment, elle a préféré
rester cachée.
Chaque
plage m'a ainsi réservé une surprise, et j'ai découvert un monde inconnu
et peu farouche. J'ai même pu expérimenter
: nageant au milieu d'un banc de quelques centaines de poissons qui faisait
plusieurs mètres de longueur et bien deux mètres d'épaisseur, j'ai essayé
de le scinder pour voir s'ils se regrouperaient. Partis de droite et
de gauche, je ne voyais plus que de l'eau devant moi ;
en
me retournant, je les ai découverts de nouveau réunis qui s'avançaient
pour m'entourer de nouveau.
D'autres poissons un peu plus grands (comme des sardines) ont "fait la
boule" comme je l'avais vu faire dans un documentaire où des poissons
beaucoup plus gros luttaient contre l'attaque d'un groupe de dauphins
en cherchant
à donner l'impression qu'ils ne faisaient qu'une énorme masse indivisible.
Cependant,
je ne suis pas très téméraire. J'ai pu profiter de toute cette vie sous-marine
car l'eau est très claire (chaude)
et le biotope très riche à faible profondeur aux alentours rocheux des
plages ou des criques. Mais
j'ai peur dès que je ne vois plus le fond, et l'eau profonde qui fonce
et refroidit plus au large, les falaises
qui
s'abîment dans des précipices insondables m'inspirent une peur presque
panique et, curieusement, une sensation de vertige, alors que je continue
de flotter tout-à-fait normalement à la surface. Mon imagination me fait
aussitôt évoquer le risque que ne surgisse un quelconque monstre marin,
requin ou calmar géant. Je ne sais pas quelle aurait été ma réaction,
par exemple
aux
îles Lavezzi
où ils
abondent
et sont protégés par la loi, si je m'étais retrouvée nez à nez avec un
gros mérou (ou pire, un banc de mérous) ! Fort heureusement, ils nagent
en eaux plus profondes, et comme je ne plonge pas en apnée et que j'évite
les canyons sombres et froids... Pourtant, il existe des visites organisées
où des plongeurs invitent des touristes à côtoyer ces gros carnassiers.
Je
me suis retrouvée, dans une crique isolée au biotope très riche, nez
à nez avec un grondin miniature. C'est
un poisson "tout en tête" avec l'air grognon et de grands yeux mobiles.
Nous sommes restés face à face un bon moment, mon visage couvert de mon
masque derrière lequel je suis sûre qu'il distinguait mes yeux, et nous
nous sommes observés, du genre, je ne cèderai pas le premier.
Finalement, après une longue hésitation, il a opté pour faire demi-tour,
je devais le gêner pous vaquer à ses occupations.
Je
regrette un peu de n'avoir pu rencontrer de Corses et de n'en avoir entendu
parler que d'une manière négative,
par Nico et Qun qui relataient que leurs patrons d'un restaurant gastronomique
réputé ne donnaient aux
employés que de la nourriture avariée, périmée,
ou des bas morceaux durs ou caoutchouteux immangeables : un comble, non
? A part les moustiques, agressifs chaque soir après le dîner, j'ai trouvé
tous les animaux bien plus sympathiques que ce couple calamiteux. J'espère
qu'il s'agit d'une exception.
![]() |
Corse |
![]() |
12 au 18 juillet 2006 |
||
Cathy, Jean-Louis, Jonathan, Archangela |
||
![]() |