Nous avons beaucoup aimé marcher dans le fond des vallées près des villages, au bord des petits champs irrigués, la vision de ce vert éclatant nous reposait après la symphonie des ocres. Assez curieusement, et bien que l'eau soigneusement captée dans des puits ou des sources et accumulée dans de petites mares paraisse finalement relativement disponible au pied de ces hautes montagnes, les zones fertiles ne sont pas exploitées de façon intensive, contrairement au Sud-Est asiatique où l'on voit des rizières jusqu'au sommet des collines les plus élevées. Ici, les gens visibles (peu nombreux) sont actifs, mais pas frénétiques, leur rythme est lent et ils ne cherchent pas à cultiver plus qu'ils ne peuvent, de nombreux champs apparemment fertiles restent en jachère, souvent avec de petits tas de fumier répartis sur la surface sèche et vide.

Hassan s'arrête près d'un maraîcher en train d'irriguer son champ de pommes de terre. Il bêche les petits talus au fur et à mesure pour faire circuler l'eau dans les sillons, avançant progressivement jusqu'au dernier avant de revenir au départ pour reconstruire la petite digue et détourner le flot. L'homme est content de se faire photographier et de montrer sa technique. Il se laisse admirer par notre groupe avec un sourire débonnaire. Que peut-il bien penser de ces citadins occidentaux ignorants des choses de la terre ?

Un peu plus loin un homme trace des sillons avec une charrue tirée par une paire de mules sous l'oeil vigilant de son père qui s'en va (curieusement) semer là où le soc n'est pas passé (avec l'auguste geste du semeur - en éventail -). J'imagine qu'il ne s'agit pas d'un labour mais d'un enfouissement des semailles ou plutôt le tracé des fossés qui seront suivis par l'eau d'irrigation... Hassan se saisit d'une poignée de grains d'orge dans un sac pour nous les montrer. Au bout d'un moment, le vieux vient récupérer la semence, on a dû l'inquiéter avec nos manipulations.

Plus loin encore, les femmes récoltent le maïs à la serpette. Les épis seront mis à sécher sur les terrasses et le reste servira de fourrage pour la vache qui reste le plus souvent à demeure dans l'étable (il n'y a rien à brouter dehors).

Nous marchons les pieds dans un ruisseau d'irrigation, le long d'autres plantations, plus ou moins reconnaissables, tandis que les aigrettes garzettes au fin plumage blanc planent et virent pour se poser un peu plus loin, en quête des vermisseaux dont elles se nourrissent.

Haut dans le ciel tournoie un rapace qui semble aussi grand que nos vautours fauves, et pareillement bicolore sous les ailes.

Sur les montagnes quasi-désertiques déboulent de temps à autre des troupeaux immenses de chèvres qui passent par des endroits invraisemblables en broutant les buissons secs et durs. Nous restons un bon moment à les observer, particulièrement l'une d'entre elles qui semble trouver un malin plaisir à brouter des feuilles au bord d'un à-pic, et ses sabots se cramponnent aux rochers acérés comme s'ils possédaient des ventouses. Une autre se dresse sur les pattes de derrière pour atteindre les feuilles supérieures d'un arbuste, sans cependant grimper dessus comme on les voit faire sur des arganiers à des altitudes plus basses. D'une torsion de la colonne vertébrale, elle se rétablit sur le sol, à notre grande admiration : que nous aimerions avoir sa souplesse ! Un petit écureuil gris s'enfuit entre deux pierres, Hassan nous désigne de petits oiseaux par leur nom français en décrivant leurs moeurs : il a une passion pour l'ornithologie.

 

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Pierre et Rose, Xavier, Max, Michèle, Julien et Jérémy, Richard et Anna, Cathy, Jean-Louis et Jonathan
Maroc 2007
28 octobre au 3 novembre 2007