Val d'Azun
15 juillet 2007 : Richard, Max, Jean-Louis B., Jean-Louis et Cathy

Ce dimanche, nous avons décidé d'en profiter à fond : levés à 5h30, nous sommes dans la voiture dès 6h pour arriver le plus tôt possible à pied d'oeuvre dans le val d'Azun, après Lourdes et Argelès-Gazost. Le brouillard épais sur le trajet annonce un beau temps qui ne s'est pas démenti, en dépit des prévisions d'orage pour l'après-midi. Dans la plaine, il fait déjà très chaud de bonne heure, mais l'altitude tempère les ardeurs solaires, surtout sur les cimes balayées par des vents violents. Par contre, la réverbération et les U.V. sont intenses : mes yeux restent encore sensibles deux jours après, malgré le bob et les lunettes, et j'ai pris un bon coup de soleil.

Les visiteurs sont ici bien moins nombreux qu'en vallée d'Ossau où nous comptions initialement revenir faire le tour des lacs. Quelques camping-cars occupent la pelouse parsemée de petits rochers gris en bordure de torrent, ainsi qu'un petit nombre de voitures : nous ne serons pas dérangés par la foule. Richard a choisi comme première destination le petit lac de retenue de Migouëlou (2278m), puis le passage d'un col, un second lac, et la longue descente en une boucle jusqu'au barrage du Tech (1207m), soit un dénivelé global d'environ 1400m, si l'on inclut la moitié d'un petit pic au-dessus du col : une bonne balade !

Ce qui me frappe immédiatement, c'est la profusion des fleurs, non seulement en quantité, mais en diversité. En plus, nous progressons littéralement dans un bain d'effluves qui varient avec l'altitude (la composition de la végétation) et la brise chaude ou fraîche qui nous apporte des brassées d'odeurs fluctuantes. Les sons ont toujours une amplitude étonnante, différente de la sensation que l'on a à Anglet : ils naviguent dans un grand volume ouvert vers le haut et se répercutent d'un flan à l'autre des montagnes en vibrant intensément. C'est vrai aussi bien pour le bruissement des feuilles des arbres que pour le chuintement des herbes ou le crissement des insectes, ou encore l'appel bruyant et peu mélodieux des choucards acrobates qui virevoltent en se jouant des difficultés de l'aéroportance.

Jean-Louis, tout comme moi, est à chaque fois déçu du peu d'animaux que nous arrivons à surprendre dans leur habitat naturel. A part les sauterelles et autres abeilles affairées, les petits oiseaux qui pépient dans les prés et les choucards, un vautour fauve égaré dans le ciel limpide, et la grosse marmotte qui trottine lourdement près du refuge du lac de Migouëlou, nous ne voyons rien. Faut-il s'en plaindre ? Je tombe sur un site qui relate le "carnage" qu'une ourse accompagnée de son petit aurait perpétré sur un versant voisin, près du lac d'Estaing, au mois de mai. Trois brebis ont été tuées, le reste du troupeau, affolé, s'est égayé dans la nature, une bonne partie se précipitant dans un ravin où l'on a retrouvé des brebis "pendues" dans les arbres.

C'est que notre habitude de la marche en montagne ne fait pas de nous des montagnards, et nous continuons de nous y promener en touristes, incapables de lire la nature, les traces des animaux, ni de reconnaître les plantes. A part les moutons qui dévalent en coulées lentes ou accélérées les versants herbeux et que nous repérons au bruit de leurs sonnailles, nous avançons peut-être au milieu d'yeux qui nous observent et d'animaux qui se terrent ou s'enfuient apeurés par notre pas lourd et malhabile. Nous sommes dans le parc national des Pyrénées, symbolisé de temps à autre sur un rocher par le cartouche rouge sur fond blanc représentant une silhouette d'isard. Les animaux, protégés, doivent théoriquement pulluler, il est même interdit de ramasser des cailloux !

A ce propos, j'aperçois dans la première montée un mur bâti en pierres de taille. Il s'agit peut-être d'un des accès à l'ancienne mine de fer dont un hameau, Ferrières, détaché du village d'Aucun en 1790, en garde le souvenir dans sa toponymie, après l'avoir exploitée du XVème siècle à 1960. Je lis plus loin qu'il y avait aussi des mines à Estaing, une vallée voisine. Plus loin, c'est la conduite forcée (cylindre noir) du barrage qui précipite l'eau des sommets vers les turbines de la vallée.

Les barrages qui perturbent profondément l'écosystème des Pyrénées ont été construits avant la création du Parc national (1967), à une époque bien moins sensible aux problèmes environnementaux. Ils nécessitent toujours un entretien régulier qui se fait en partie par hélicoptère, dont le bruit perturbe la faune. Une convention de partenariat a donc été établie entre EDF et le Parc national pour faire des échanges de services. Par exemple, en septembre dernier, à proximité des barrages d’Estaëns en vallée d’Aspe et de Migouëlou en Val d’Azun, un hélicoptère d’EDF a joué les « camions-poubelles » emportant, accrochés à une élingue, des vieux bouts de tubes rouillés. Sans la machine, ces pièces parfois volumineuses et en tout cas impossibles à charrier à dos d’homme seraient restées gisantes sur les flancs des montagnes. D'autre part, des agents du parc national dispensent depuis 2005 leur précieux savoir aux salariés d’EDF concernant les espèces et les espaces à protéger. À eux ensuite d’organiser leur travail en prenant en considération les impératifs de protection du milieu naturel des Pyrénées, de façon à éviter notamment des déplacements aériens au moment des accouplements et de la nidification. Le partenariat concerne également la promotion des énergies renouvelables avec l’équipement par EDF de bergeries ou refuges isolés en panneaux photovoltaïques. Enfin, EDF a aussi fait un bel effort, que nous remarquons, pour enterrer les fils qui défiguraient les pittoresques petits villages de la vallée.

A propos de ces barrages, une étude des lacs et cours d'eau de ce groupe de petites vallées a été faite par Ludovic Gaurier (1875-1931) qui était chargé de mission des ministères des Travaux publics et de l'Agriculture. Elle est résumée sur le site "Système lacustre de la haute vallée d'Azun". Ses missions avaient pour objet la connaissance de données météorologiques, de l'enneigement et des variations des glaciers, de l'alimentation, de la topographie et de la géologie des lacs, des projets de barrage pour les transformer en réservoirs de "houille blanche", pour la force motrice, l'électrification de la Compagnie du Midi, l'irrigation, etc...

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