Le train nous a menés à Lille sans fatigue depuis Bayonne (avec changement à Bordeaux). Lorsqu'il s'est arrêté, nous n'avons pas réalisé que nous étions arrivés : un bassin d'agrément dont l'eau reflétait en miroir fidèle une structure à l'architecture très moderne s'étalait à notre gauche le long de la voie, prolongé d'une vaste place découverte. A notre droite, le quai ressemblait à celui d'un métro parisien des quartiers chics. Nous avons pris l'ascenseur qui nous a déposés à l'étage au-dessus dans un véritable hall d'aéroport, luxueux, volumineux, empli de panneaux signalétiques que nous avons suivis pendant des centaines de mètres pour prendre possession de notre voiture de location. Un peu plus, et nous ne sortions pas du parking, un vrai labyrinthe qui nous faisait tourner en boucle (bourrique), et donnant sur une bretelle de la rocade, évidemment en sens inverse de Bruges où nous souhaitions nous rendre !

Après un demi-tour calamiteux, quelques hésitations dans les embranchements, nous avons émergé de l'agglomération en pleine nature, paysage de bocage, bosquets de feuillus, vaches noir et blanc disséminées dans des prés de petites dimensions, encore des champs de maïs, et des villages coquets dominés par la flèche grise ou blanche de leur église gothique. Je n'avais pas de plan de Bruges, et nous avons erré pendant près d'une heure pour trouver notre chambre d'hôte (première photo), située dans une impasse retirée au bord d'un étroit canal qui longeait un parc agrémenté d'un lac où se pavanaient en cancanant des cygnes et des colverts. Il faisait un froid de canard, c'est le cas de le dire, et nous avons senti le souffle du grand Nord qui sévissait, à ce qu'il a semblé, sur l'Europe entière pendant ces premiers jours d'octobre. Nous n'avons pas regretté les pulls, bonnets et pantalons d'hiver amenés par précaution. Notre hôtesse, Tiny, jeune femme enceinte déjà très occupée par un aîné de deux ans revendicatif, nous a fait un accueil par contre très chaleureux, de même que son mari, Kevin, et nous avons eu le plaisir de partager nos petits déjeuners pantagruéliques et typiques avec un couple de jeunes Berlinois en vacances, qui naviguaient avec aisance de l'allemand à l'anglais. Nos hôtes flamands, quant à eux, parlaient aussi couramment l'anglais que le français.

J'aime découvrir un lieu sans idées préconçues. Je savais simplement que Bruges, surnommée la "Venise du Nord", était un haut lieu touristique dans un cadre pittoresque. Nous n'avons pas été déçus : une circulation automobile presque inexistante, une population de tous âges à pied ou à vélo, un centre ancien très bien conservé, mais pas désincarné contrairement à Venise, avec des écoliers et des petits commerçants, des bars et des étudiants, des touristes, mais aussi des ménagères et des employés. Les canaux y sont moins nombreux, mais la ville historique est également plus circonscrite. Nous errions au hasard, et nos pas nous ramenaient immanquablement dans le centre ville. L'histoire très riche de Bruges se lisait sur les bâtiments, pour la plupart de brique, à l'architecture très variée, dont l'un des plus ancien (1399) (photo ci-contre), semblable à une église gothique, anciennement intitulé la Saaihalle, est occupé de façon un peu scandaleuse par le Frietmuseum (musée de la frite), ouvert en mai 2008 !

Comme Toulouse, Bruges complexait un peu de ne pouvoir utiliser la pierre, faute certainement de carrières proches, et les constructeurs se sont ingéniés à agencer les briques en imitant le travail de la pierre, façades sculptées, ajourées, travaillées, jouant de la couleur variée de l'argile dont la palette s'étale du blanc crème au rouge sombre, ou la cachant derrière du bois, des enduis et peintures, ou même des carreaux de faïence. Ce qui nous amusait, c'était les faux derniers étages avec fenêtres simulées celant un toit derrière le haut fronton orné, en marches d'escalier ou courbures esthétiques. Des arcs en plein cintre formés de briques disposées dans le sens de la hauteur, des toits soulignés de briques perpendiculaires à la pente et enfoncées en biais dans l'alignement horizontal du mur, des briques en coeur, en rosaces, en quinconce, en treillis, en colonnettes ou arceaux, en berceaux et piliers...

Et, au détour d'une rue, un canal aux eaux changeantes, reflets du ciel où roulaient des nuages qui avaient une fâcheuse tendance à prendre une teinte plombée menaçante, mais aussi des maisons colorées et des arbres très présents dans la cité paisible. Ils nous ont rendu d'ailleurs service, offrant leur protection lors des ondées passagères très océaniques qui nettoyaient les rues déjà suffisamment nettes et propres, où les habitants avaient déposé leurs sacs de vieux journaux et cartons qu'un camion récoltait pour être recyclés.

SUITE

Cathy, Jean-Louis, Cédric
Escapade à Bruges
1er octobre 2008