Un petit séjour de détente à la neige, à faire des raquettes avec tous les membres de l'AASSC, réunis l'espace d'un week-end loin de leur repère habituel de la plage des Corsaires, pour retrouver Yann et sa famille désormais sur Oloron, voilà tout ce que je souhaitais. Rose avait proposé le gîte de son frère Jean-Paul à Lescun où nous avions séjourné pour la dernière fois en 2002 et dont nous avions conservé un excellent souvenir, et j'avais accepté avec joie. Finalement, parmi la vingtaine d'adhérents de notre association de baigneurs en toutes saisons, seul le petit groupe des irréductibles anciens a pu se libérer, et nous n'étions "que" neuf à passer la soirée et dormir sur place.

Toute la semaine, le temps a été exécrable, et il fallait avoir la foi pour croire aux prévisions météo qui annonçaient grand beau temps le week-end. Nous sommes donc partis de bonne heure samedi, avec un plafond nuageux très bas qui nous empêchait de voir les montagnes, et nous avons rejoint les Bretons au village. Le temps de poser les affaires dans la maison et d'y allumer le chauffage pour qu'elle soit vivable à notre retour, et nous avons repris les voitures pour nous rendre plus haut et tâcher de trouver un peu de neige. Nous étions déçus (surtout moi). J'étais persuadée qu'avec toute l'eau que nous nous étions reçus sur la côte, il avait dû neiger énormément en montagne, et je m'attendais à un tapis de neige fraîche très bas dans la vallée (je m'étais même demandée s'il faudrait prendre les chaînes, que j'avais glissées à tout hasard dans le coffre).

Eh bien non ! Il n'y en avait que sur les hauteurs, et encore, pas en couche régulière, et elle avait visiblement fondu depuis les dernières chutes, ne laissant qu'un manteau bien mité qui terminait en s'effilochant vers l'aval. Il faut dire qu'il ne faisait pas bien froid et que nous sentions le soleil derrière les nuages qui commençaient à s'amenuiser, laissant apparaître la vision merveilleuse du panorama des pics du cirque de Lescun. Cette douceur de l'air faisait le bonheur des sangliers dont nous observions les traces sur le chemin boueux et les ravages dans les prairies dévastées aux mottes d'herbes déracinées et retournées sous lesquelles les bêtes affamées par l'hiver cherchaient les petits bulbes dont elles étaient friandes.

Nous nous sommes promenés donc tranquillement, sur un sentier qui s'enneigeait très progressivement, et nous avons fini par atteindre un petit gîte de pierre ouvert aux randonneurs, avec du bois dans un âtre, des allumettes suspendues dans un sac à une poutre, et la recommandation de n'y laisser aucun déchet pour que l'endroit reste intact pour les suivants. Pique-nique pantagruélique, où nous avons partagé nos victuailles, dégustant les pâtés confectionnés par Rose, le saucisson d'Isabelle et le serrano du petit boucher d'Anglet centre, avant de nous séparer en deux groupes, sieste et balade.

Les Bretons et Rose sont restés à prendre le soleil qui se découvrait de plus en plus, et nous sommes partis explorer le fond de la vallée, évasé en un vaste réceptacle des eaux qui s'écoulaient des plaques de neige en torrents et cascades, jaillissaient du sol en sources bouillonnantes ou s'étalaient en marécages fangeux et traîtres. Là encore, la vie se signalait en traces animales de lièvres, sangliers ou isards imprimées dans la neige. Tandis que les autres restaient près d'une borde désaffectée, j'explorai un peu les pentes, enfonçant parfois dans la neige amollie qui gouttait à l'intérieur de mes chaussures. Au loin vers l'aval les brumes s'accrochaient encore tandis que nos yeux éblouis peinaient à fixer les cristaux lumineux.

Sur le chemin du retour, Yann a eu brusquement envie de faire trempette dans un torrent. "Si tu y vas, j'y vais !" lui a rétorqué Jean-Louis. Et Yann, tout étonné de cette réponse dynamique, n'a plus hésité, il a commencé à ôter un à un ses vêtements tandis que Jean-Louis hurlait "N'y vas pas ! Non, Yann, tu vas attraper la mort !", et que Richard se dépêchait de sortir son appareil photo en attrapant copieusement Jean-Louis qui s'éloignait discrètement et en lui disant qu'il perdrait la face s'il n'en faisait pas autant ! Pierre a commencé à se déshabiller aussi, Richard s'y est mis, et Jean-Louis a fini par les imiter tandis que Michèle mitraillait tout le monde depuis le petit pont qui dominait la cuvette au pied de la cascade. Quels courageux ! L'eau n'était même pas si froide que ça, paraît-il !

De retour au gîte, nous n'avons cessé de nous restaurer (l'air de la montagne, ça creuse !), passant du chocolat chaud à la sangria, en attendant Rose et Michèle qui avaient fait un crochet pour prendre chez la fermière une grande jatte de mamia, le lait caillé de brebis, que nous arroserions de miel pour notre dessert. Puis nous avons continué avec le vin qui accompagnerait le dîner de pâtes à la sauce tomate et au fromage râpé assorti d'entrecôtes aux échalottes, grillées au-dessus des braises dans la cheminée autour de laquelle séchaient nos chaussures et chaussettes trempées. Sur ces entrefaites, Cédric est arrivé, épuisé, transpirant, mais ravi d'avoir réussi l'exploit de parcourir sur son VTT tout neuf le trajet de Pau à Lescun, avec seulement trois haltes, s'il vous plaît, et malgré un sac à dos bien lourd ! S'étant fait voler son vieil "os" sur le parking à vélo de la fac à 8 heures du soir, il a craqué pour un bel engin avec lequel il compte aller de Pau à Barcelone à la fin de l'année scolaire : il faut bien qu'il s'entraîne !

Après une partie de Jenga acharnée, où les verres ont failli valser en même temps que la dégringolade de la tour branlante, les Bretons sont partis, le dîner a été mis en route et nous avons clôturé la soirée par un Pictionnary mouvementé. Ce jeu est plaisant, car chacun a sa chance pour gagner. Il faut dessiner, mais surtout suggérer, sans dire un mot ni faire un geste, des objets ou des concepts, pour que les autres devinent par approximation successive de quoi il peut bien s'agir. Parfois, quelques coups de crayon suffisent, mais un mot mal assimilé ou une idée difficile à représenter peuvent nécessiter toute une série de griffonnages pour parvenir à faire trouver la solution. Les mots jaillissent, mais seul le terme exact noté sur la petite carte est valable, et ce n'est pas toujours celui qui a trouvé l'idée qui réussit à l'énoncer à temps, menant un autre plus rapide au résultat final : "Voleur !".

 

SUITE

 

 

 

Participants : Pierre et Rose, Max et Michèle, Richard, Xavier, Cathy et Jean-Louis, Cédric (samedi soir et dimanche), Yann, Isabelle et Cécile (journée du samedi)
Lescun
19-20 janvier 2008
Sauvetage à l'hélicoptère