Phare à Ploumanac'hNous sommes étonnés de la propreté du littoral, aussi bien l'eau, limpide, transparente, sans déchet flottant que la grève de sable blond ou noir, de galet ou de rocher, dépourvue même de tout branchage, que les sentiers, routes, villages et villes. Il est vrai qu'il y a nettement moins de monde que sur la côte basque, les plages semblent dépeuplées en comparaison et nous en arrivons à faire les difficiles et ne vouloir nous baigner que sur les plages désertes. Seule ombre au tableau : les traces de marée noire incrustées dans les roches sur une bande correspondant sans doute au niveau de la marée au moment de la catastrophe.

Le dernier jour, nous voyons se faufiler entre les gros rochers de la plage une hermine (cliquer sur ce mot pour consulter le site internet sur le symbole de l'hermine dans le drapeau breton), que Pierre prend d'abord pour une belette. Petit animal timide au pelage soyeux, il se nourrit de mulots et de musaraignes, n'est pas chassé, et pullule tant que la nourriture abonde pour se raréfier dans le cas contraire. Drapeau breton sur l'enseigne de la biscuiterie du Trégor

L'hermine est mentionnée pour la première fois en Bretagne à la fin du Moyen-Age et le Duc de Bretagne (Jean III, en 1316) l'inscrit dans ses armoiries. C'est au moment des croisades que les blasons décorent les écus, boucliers de protection pour la guerre. La fourrure de l'hermine (blanche, celle de l'hiver) orne le devant (en signe de pureté), fixée par la queue (à pointe noire) à l'aide d'une barrette transversale (noire aussi). Le symbole de l'hermineC'est cette extrémité qui est symbolisée sur le drapeau breton créé au début du XXe siècle en s'inspirant du blason de Rennes et de la bannière étoilée des Etats-Unis.

Tout en cheminant, nous observons le paysage, bien sûr, mais aussi les maisons aux toits pentus recouverts d'ardoise grise, les murs étant, soit de granit, soit de crépis blanc avec frontons pointus de granit au-dessus des portes et fenêtres. Pierre, Cathy, Christine, Jean-Louis, Rose et JanoDe multiples marques de la ferveur religieuse des Bretons scande le trajet. Par exemple, nous trouvons un oratoire (photos en haut de la page) les pieds dans l'eau ! De petites chapelles (cliquer sur ce mot pour consulter le site internet) jalonnent le sentier, témoins de la piété de cette population de marins dont les femmes priaient ardemment pour une navigation sans histoire de leurs pères, maris ou fils.

HortensiasDes guérites de douaniers en pierre sont dressées sur le parcours, rappelant aux promeneurs qu'il ne fut pas toujours un sentier d'agrément. Pierre escalade tous les rochers, malgré les panneaux avertissant qu'ils peuvent être glissants, et Jean-Louis s'extasie devant les coloris intenses des hortensias d'un rose tirant vers le rouge, ou alors bleu-indigo. Au passage sur un pont à Trégastel, nous faisons halte dans un ancien moulin à marée. Bien avant l'usine marée-motrice de la Rance (que Jean-Louis et moi n'avons pu visiter avant d'arriver à Lannion à cause du plan vigie-pirate), les Bretons avaient construit des digues dans des lieux propices. Celui de Trégastel remonte à 1375 (histoire du moulin inscrite sur un des panneaux à l'intérieur).

Moulin à maréeEn voici le principe. La digue est percée de plusieurs ouvertures sous la chaussée. Près du moulin, deux tunnels jumeaux permettent l'entrée de la marée. Du côté de l'étang, ils sont munis de battants en bois qui se rabattent sous la poussée du flot descendant et emprisonnent l'eau en amont. C'est en agissant sur le débit en faisant coulisser une pelle placée verticalement dans la conduite forcée que l'on maintenait constante la vitesse de rotation des meules. L'étang avait été conçu autant pour la pêche que pour fournir l'énergie nécessaire au moulin. La différence de niveau entre la surface de l'étang et le bas de la roue dépendait surtout de l'ampleur des marées. Avec une superficie de l'étang d'environ 3 ha et une profondeur moyenne de 5 mètres, le volume d'eau disponible est d'environ 150 000 m3 à chaque marée ; le moulin en utilisait moins du centième.Meule

Coupe transversaleA l'époque du dernier meunier (1900-1932), le moulin était doté de roues à eau de 5 à 6 mètres de diamètre, une de chaque côté, actionnées par en dessous et situées à l'extérieur du moulin. A l'intérieur, une meule tourne, servant à moudre du grain ou à transformer des blocs de glace en paillettes pour la conservation de la morue (à l'époque de la pêche à Terre-Neuve) dans les cales des bateaux. Le meunier travaille ainsi jusqu'à épuisement du réservoir, puis attend que la marée suivante le remplisse à nouveau pour reprendre son travail. Son rythme est de 2 fois 6 heures par 24 heures, de jour ou de nuit, puisque l'état de la marée conditionne ses horaires. Aux grandes marées d'équinoxe, la mer submerge la digue et inonde le moulin, il faut hisser les sacs de blé sur des tréteaux pour les conserver au sec.

Roue du moulin de BréhatPrune sauvageNous prenons le bateau pour l'île de Bréhat, qui draine des foules considérables. Elle se visite à pied ou à vélo, étant donnée sa taille importante. Comme d'habitude, Pierre lie conversation avec les autochtones, et nous avons le plaisir de découvrir la prune sauvage, ronde et rouge comme une cerise, mais avec un goût de prune certain, sucrée à souhait. Rose se lamente devant des cèpes qu'elle ne peut ramasser : il faudrait les porter toute la journée et cuisiner le soir au camping, en ayant acheté préalablement l'ail et le persil, trop compliqué. cèpesIl y a aussi quantité de prunelles couleur myrtille que Jano appelle Patxaran et que Yann nous avait désignées comme des gains lors de notre balade sur le sentier du littoral basque.

Dans l'ancien fort encastré dans une colline, nous trouvons une verrerie. Au détour d'une baie, dans une petite crique cachée par un éperon boisé, nous découvrons des cavalières qui baignent leurs chevaux dans la mer. Menés par une longe vers le sable sec, ceux-ci basculent, au risque d'écraser les jeunes filles qui s'écartent un peu pour les laisser s'ébrouer, les quatre fers en l'air. Après, le sable les démange et ils recommencent de plus belle... C'est bien joli à voir. Cette île, à l'instar de celle de la Guadeloupe, (en plus petit) est composée de deux parties reliées par un isthme. Nous atteignons le phare, à l'extrémité la plus sauvage, d'où nous apprécions la vue panoramique. Le retour est un peu moins plaisant, les foules refluant vers le dernier bateau qui nous ramène au continent.

 

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